Nous sommes en 2020. Et depuis l’hyme du MLF (Mouvement de Libération de la Femme) a été chanté peut-être des milliers de fois. « Debout ! Debout ! » Depuis on a croisé des Marie Laguerre au tribunal, lu des Sandra Müller sur Twitter et écouté Lauren Bastide en boucle. Depuis on a eu Simone, #metoo, Emma et les manifestations menées par le collectif NousToutes. Pourtant. Nous sommes en 2020 et la semaine dernière, une jeune femme s’est présentée en me disant : « je suis féministe mais bon pas extrémiste » avant d’embrayer sur la charge mentale dans son couple.
Qui a peur du mot féministe ?
Cette femme, c’est moi, c’est vous, c’est nous. C’est ce fantôme pernicieux qui accompagne nuit et jour le mot féministe, qui le discrédite en public, le fait passer pour ce qu’il n’est pas. Un petit fantôme qui l’oblige à regarder ses chaussures et à avoir honte de ses prochains mots. Mais, lorsque l’on prononce « féministe mais pas trop », qu’exprime-t-on réellement ? Une excuse ? Une gêne ? Un malaise ? Ou le besoin d’affirmer pour celles et ceux qui n’auraient pas le sous-texte que non, le féminisme n’est pas le pendant féminin du machisme. « N’allez pas croire que je vais brûler mon soutif devant vos yeux et que je rêve d’émasculer des mecs la nuit. » Le machisme n’est pas le féminisme au masculin. Les mots s’opposent comme l’eau et l’huile, la nuit et le jour. Ils sont insolubles. Le féminisme est pluriel et pourtant il est unique, il se base sur l’égalité des sexes et non sur l’asservissement d’une moitié de la population. À ce titre, nous sommes toutes féministes (coucou Chimamanda Ngozi Adichie).
Un féminisme bon à marier
Mais alors, existe-t-il seulement un féminisme poli ? Un féminisme » pas extrémiste » qui se contenterait du droit à l’IVG, de porter un pantalon et de voter « comme un homme ». Un féminisme qui ne dérangerait pas, qu’on aimerait emmener avec soi en soirée. Un féminisme qui ne sourcillerait pas quand le voisin écarte ses jambes pour asseoir son espace, qui ne s’offusquerait pas qu’on le siffle dans la rue. Un féminisme qui serait ok pour un salaire moins important, parce que comme ça il a le temps d’aller chercher le petit dernier à la crèche.
Est-ce qu’en 2020, on a encore le temps d’un féminisme qui, plein de mansuétude, remercierait qu’on lui tienne la porte ? Sûrement pas. Parce que, nous sommes féministes, point.